Comme vous le savez sûrement, Stanley Kubrick n'est pas un monsieur très facile à approcher. Enfermé dans sa demeure de quarante pièces, possédant tout ce qu'il est possible d'avoir à sa disposition (salle de projection ultra moderne, tables de montages high-tech, archives colossales, livres du monde entier, jusqu'au stylo dernier cri), errant dans sa tour d'ivoire tel Jack Nicholson dans l'Overlook Hotel de Shining,ne recevant chez lui que ses proches collaborateurs, après s'être assuré de leur discrétion. Lorsqu'il a besoin d'un renseignement précis, il dispose de nombreux télex et lignes téléphoniques. On le voit, le réalisateur se comporte en stratège dans son camp retranché.
Il pousse même la perfection au contrôle des différentes copies (amorce des débuts et fin de bandes) de ses films projetés dans le monde entier, des multiples salles de projection, écrans et fauteuils compris. De plus, il a formé un véritable réseau d'informateurs qui fonctionne à plein rendement. Un appel lui suffit pour tout savoir sur la moindre anomalie concernant ses films, et cela grâce au travail de fourmis de ses nombreux admirateurs fidèles et dévoués.
Lors de la sortie de chacune de ses oeuvres, il supervise personnellement toutes les versions en langues étrangères (à l'Anglais), s'occupe activement de leur campagne de distribution, ainsi que de leur masterisation en format vidéo (souvent en Pan & Scan). Rien n'échappe à Kubrick, maître absolu de son navire, qui n'a, depuis vingt ans, aucun compte à rendre à personne et encore moins à sa compagnie productrice (Warner), qui passe son temps à lui signer des chèques en blanc en attendant que le maître veuille bien donner des informations.
Ne tournant jamais dans un rayon de plus de cinquante kilomètres de son domicile, Stanley Kubrick arrive toujours au studio avec une demi heure d'avance pour "sentir" l'atmosphère. Quand il doit tourner des extérieurs à l'étranger, il prépare sur le papier, après s'être fait projeter le maximum d'informations sur le sujet, le plan de route du réalisateur de la seconde équipe. Pour la sortie mondiale d'un de ses films (du moins jusqu'à Full Metal Jacket), il choisit personnellement le critique de chaque pays qu'il souhaite rencontrer, après avoir lu consciencieusement les "papiers" de celui-ci l'heureux élu est alors autorisé à prendre l'avion pour venir partager les sandwichs et le thé de Kubrick dans la proche banlieue de Londres. A ce moment, le réalisateur se fait totalement disponible, répond avec rigueur aux questions qui lui sont posées et même dirige l'interview en prenant bien soin qu'aucune question importante ne soit oubliée dans la fébrilité bien compréhensible qui s'est installée. C'est une des raisons pour lesquelles il est le plus grand cinéaste de notre temps.
Pour démythifier un peu le personnage et surtout pour qu'on n'y revienne plus, précisons que Kubrick conduit une Porsche 928 S et s'autorise de temps à autre un 160 à l'heure sur l'autoroute, qu'il travaille effectivement depuis quelques années sur Docteur Folamour pour tenter de reconstituer un négatif propre à partir de deux positifs, qu'il vit et tourne à Londres parce qu'il n'apprécie guère Hollywood et que Londres offre des qualités de tournage supérieures à New-York, qu'il a souvent échangé son salaire contre un droit de regard (final cut) sur ses films, qu'il fait tirer chaque prise pour être sur au montage de détenir la bonne et qu'il consulte le Virginia Kirkus Report (catalogue de toutes les parutions en librairie) pour repérer les ouvrages les plus intéressants. Comme il le dit lui-même: "Personne ne peut tout lire". En revanche, il visionne tous les films lorsqu'il ne tourne pas.
Michel Ciment a superbement résumé toute approche du maître dans l'ouvrage qu'il lui a consacré. Nous nous permettons ici d'en reproduire un extrait : "Tout critique, je crois bien, qui a voulu aborder l'uvre de Stanley Kubrick, a ressenti les limites de son propre discours. Parler du Cinéma (c'est-à-dire exposer au lecteurs en termes conceptuels, avec des mots, une série d'associations d'images animées) est en soi un défi. Le voici redoublé devant des films que leur auteur a toujours décrits comme une expérience non verbale. Et le refus souvent manifesté par Kubrick de commenter sa création vient du désir de préserver une frange de mystère et d'indétermination. Cette oeuvre exige et défie en même temps l'analyse."
On réagit à une histoire un peu comme
on tombe amoureux de quelqu'un.
Stanley Kubrick
Vous avez réalisé douze films dans votre carrière ; tous ou presque d'un
genre différent. Est-ce le fait du hasard ou un choix délibéré?
En réalité, je ne me suis jamais préoccupe du genre de film que j'allais
faire. Seul importe le sujet. Il s'agit plutôt d'une attirance pour une histoire
et surtout de savoir si elle est réalisable d'un point de vue cinématographique.
Je lis des parutions du monde entier, et même si je devais être attire plusieurs
fois par un genre similaire, je continuerais à ne réaliser.
Vous
êtes ce qu'on peut appeler un perfectionniste. Il vous faut de plus en plus
de temps pour faire un film. Pouvez-vous en exposer les raisons?
Il m'est difficile de choisir un sujet. Pour Shining, je n'ai pas
cessé de lire pendant deux ans, jusqu'à ce que Julian Senior me parle de Stephen
King. Il m'arrive de trouver un très bon livre mais non visualisable ; je préfère
parfois un ouvrage plus simple sur lequel je peux apporter mes propres idées
(cf. la scène du labyrinthe qui a remplace celle de l'hôtel en flammes à la
fin de Shining). Une fois que j'ai trouve l'histoire et c'est déjà un
vrai miracle, il me reste à écrire l'adaptation, soit avec un co-scénariste,
soit directement avec l'auteur du livre. Tout cela prend du temps mais, lorsque
j'arrive sur le plateau, le film est sur le papier, ce qui évite bien des mésaventures
et des dépassements de budget.
Pourquoi
n'écrivez-vous jamais de scénarios originaux?
L'avantage que j'ai en n'écrivant jamais de sujets originaux, serais- je
d'ailleurs capable d'en écrire? - c'est que je peux lire des choses pour la
première fois. Et cette découverte, par définition, ne se produit qu'une seule
fois. C'est par la que tout commence. Ensuite vient un travail de décodage,
ayant pour but de dégager de l'uvre de base une structure qui lui soit fidèle,
qui n'en réduise ni les idées ni les émotions. Et tout cela en respectant les
limites de temps qui sont celles d'un film. Aussi longtemps qu'il est possible,
on essaie de conserver en soi l'émotion quelle qu'elle soit, qui nous a fait
tomber amoureux du sujet. On juge la scène en se demandant: Est-ce que je réagis
toujours à ce que je vois là? Le processus est à la fois analytique et émotionnel.
On s'efforce de trouver un équilibre entre l'analyse et le calcul d'un côté
et les émotions de l'autre.
Pour
Full Metal Jacket, la difficulté semble avoir été plus grande que pour
vos autres films. Sept ans ni plus ni moins?
Pour Full Metal Jacket, le problème est un peu différent. Les bons
sujets sont de plus en plus difficiles à trouver et quand je suis tombé sur
The Short-timers de Gustav Hasford, j'ai tout de suite voulu le rencontrer.
Il était réticent à une adaptation de son roman et il a fallu le convaincre
que ses idées et ses opinions seraient respectées, que le but n'était pas de
se servir de son livre comme d'une toile de fond à un mélodrame ou à une simple
dénonciation de la guerre du Vietnam nous avons aussi dû interrompre le tournage
pendant quatre mois à la suite de l'accident de voiture terrible dont a été
victime Lee Ermey et, sans lui, nous ne pouvions rien faire. Nous avons débuté
les prises de vue en Août 85 pour les achever en Septembre 86. Le livre était
si dense que le montage a pris du temps; nous ne devions pas dépasser les deux
heures Si nous voulions retenir toute l'attention du spectateur, sans compter
les impératifs commerciaux qui nous contraignaient à resserrer l'histoire.
Avec le recul, vous ne pensez pas vous être attaque à forte partie, après
les superbes films que sont Apocalypse Now, Voyage au bout de l'enfer
et Platoon?
Mon but n'a jamais été de faire un manifeste sur la guerre du Vietnam.
Je voulais juste raconter une histoire et donner ma vision de cette tragédie.
Les films que vous citez, malgré leur valeur, ne sont pas un aboutissement du
genre mais des visions personnelles de leurs créateurs. Platoon est un
film bien tourné, magnifiquement joué mais il lui manque un certain contenu.
Quant à Apocalypse Now, je crois savoir que Coppola s'est empêtre dans
son histoire, justement parce qu'il n'en avait pas. Alors il devait combler
en rendant chaque scène plus spectaculaire que la précédente, jusqu'à la dernière,
où Brando essayait de donner une dimension métaphysique à l'ensemble. Cela fonctionnait
néanmoins et le résultat était fort. Vous savez, il y a des aspects de cette
guerre que l'on n'a pas traités, notamment celui de "la mise en condition" de
ces hommes qui, finalement, sont aussi à plaindre car ils portent maintenant
ce fardeau comme une plaie qui ne cicatrise plus. Sans compter que l'offensive
du Tet, présente dans mon film, est le seul véritable combat organisé qu'aient
livré les Marines. Le reste du temps, ce n'était qu'embuscades répétées en pleine
jungle. Si on ne devait choisir que des sujets non traités, il serait pratiquement
impossible de faire un film. Heureusement, beaucoup d'entre eux sont différents
de par la sensibilité de leurs auteurs. Je n'aurais jamais fait Shining
si j'avais dû faire attention au nombre d'adaptations des romans de Stephen
King.
Que
pensez-vous de la violence?
Même s'il existe une certaine dose d'hypocrisie autour de la question,
tout le monde est fasciné par la violence. Après tout, l'homme est le tueur
le plus impénitent de la planète. Notre intérêt pour la violence reflète en
partie le fait que, sur le plan de l'inconscient, nous différons très peu de
nos ancêtres primitifs.
D'aucuns
considèrent que Shining est votre film le plus autobiographique. Etes-vous
d'accord avec cette définition?
En partie seulement. Il est vrai que le personnage de Jack, interprété
par Jack Nicholson, me ressemble sur certains points. Il est sûr que certains
de mes fantasmes transparaissent dans le film mais tout cela relève de la caricature.
Si l'on va dans ce sens, il y a beaucoup de moi dans chacun de mes films.
Le personnage de Jack se débat dans un labyrinthe plutôt mental que palpable,
s'enferme dans sa propre folie, est le seul à voir ce qui l'entoure un peu comme
le réalisateur est le seul à connaître le cheminement de son propre film. Il
tourne en rond en écrivant toujours la même phrase sur ses feuillets. La similitude
nous paraît plus qu'évidente. Pas à vous?
Certainement que, vu dans ce sens, nous nous ressemblons. Vous savez, faire
un film revient à s'isoler, à ne plus voir ce qui nous est proche. Cela vous
prend tout entier, vous possède, vous réclame et il est difficile d'y échapper.
A un moment ou un autre, on se demande si l'on ne devient pas fou, commande
par des forces invisibles. Faire un film impose une totale abnégation de soi,
une complète disponibilité et c'est la raison qui me pousse à m'enfermer, à
m'isoler du monde extérieur. Des qu'on devient imperméable à ce qui nous entoure,
on ne reçoit plus la réalité en face, on bascule vers ces choses indéfinissables
qu'on nomme la créativité. Dans ce sens, oui, je suis assez proche de Jack.
Vous
avez un contrat pour trois films supplémentaires avec la Warner. Pour quelles
raisons?
Effectivement, je m'entends bien avec les dirigeants de la Warner. Ils
me laissent entièrement le champ libre, ne sont pas trop regardants sur mes
budgets et me donnent le contrôle total de mes productions. De plus, on ne change
pas une équipe qui gagne et Shining et Full Metal Jacket ont fait
un beau succès. Je crois même que ce sont mes deux plus gros succès sur une
première exploitation. Barry Lyndon, qui était déficitaire au début,
s'est largement rattrapé par la suite.
Vous
êtes réputé pour votre souci de perfection, votre grande connaissance dans tous
les domaines de la fabrication d'un film. D'où cela vient-il?
D'abord de ma formation de photographe pour être cinéaste, il faut avant
tout connaître la photographie. Il est impensable de mettre en scène une suite
d'images sans savoir comment elles seront filmées. Tout comme les décors un
réalisateur doit avoir son film dans la tête, il doit savoir quelles couleurs,
quels cadrages seront utilisés. Nul autre mieux que lui ne peut avoir une vision
définitive de telle ou telle partie de son film. Il est un peu l'homme à tout
faire de la production. Ce qui n'empêche pas que la collaboration avec des spécialistes
dans chaque domaine est indispensable. Dans les années 50, les réalisateurs
savaient tout faire, n'étaient pas obligés de déléguer leurs pouvoirs. On assiste
à un certain laxisme de la nouvelle génération, même si ça s'améliore un peu,
qui s'investit dans des films sans connaître le déroulement total de la production.
On
a dit de vous que vous étiez un moraliste pessimiste. Qu'en pensez- vous?
Cette définition me semble assez valable quoique un peu contradictoire.
Il est vrai que mes films finissent plutôt mal, que ce soit dans Barry Lyndon,
Ultime Razzia, Docteur Folamour, Spartacus ou Lolita,
mais à chaque fois, les héros ne portent jamais le bien comme étendard ils sont
toujours ambigüs et si je privilégie le mal, ce n'est pas qu'il me ressemble,
mais plutôt qu'il est plus évident et complexe que le bien. La morale est de
donner une contrepartie aux crimes les plus infimes, mais cette morale est toujours
contrebalancée par une autre, celle la pessimiste, que l'on m'accorde. Dans
Orange Mécanique, Alex redevient mauvais malgré le traitement qu'on lui
a fait subir qui, lui-même, est mauvais. Je dirais que c'est un juste retour
des choses et que l'homme revient à l'homme. Dans Spartacus, l'instigateur
de la liberté meurt sur la croix, tel le Christ, mais impose sa victoire dans
le doute qu'il laisse derrière lui, dans la peur irréversible qu'il a installée.
La bombe de Docteur Folamour explose sur un air de musique, un peu pour
prouver que, les individus étant ce qu'ils sont, il n'y a pas d'autre alternative
que celle de la dérision. Les protagonistes de Lolita se déchirent pour
sauvegarder leur vie et l'intrusion de Sue Lyon ne représente que la libido,
ce démon de midi qu'a illustre Billy Wilder dans Sept ans de réflexion
avec un humour sarcastique, humour qui permet bien des écarts. Il est signifiant
de constater comme on peut faire passer une multitude de choses par la dérision.
Le comique est le plus sûr moyen de critiquer, certainement pas le moins fort.
Dans Ultime Razzia, les gangsters meurent de la gangrène qu'ils ont eux-mêmes
instaurée. Quand la police arrive sur les lieux, le travail a déjà été accompli
par la volonté destructrice de l'homme. La morale n'est pas: Tu as tué, tu dois
mourir, mais: Tu as tué, tu ne peux plus vivre. Certainement que je suis moraliste,
bien sûr que je suis pessimiste, mais moralisme et pessimisme sont deux concepts
qui s'accordent trop, tout en étant divergents. Peut-être est-ce la vocation
de l'artiste de prêter à confusion autant aux autres qu'à soi-même.
Tel
qu'il est parti, faudra-t-il attendre 1995 pour voir votre treizième film?
Je ne sais pas. On n'accouche pas si facilement d'une obsession. J'ai déjà
réalisé douze films. Cela fait longtemps que je ne fais plus la course et roule
à ma vitesse.
Dernière
question : pouvez-vous nous expliquer, enfin, le sens de la fameuse fin de 2001:
l'odyssée de l'espace?
Je ne sais pas. 2001 est un film a part dans ma carrière, celui
auquel je tiens le plus, probablement. David Bowman, après avoir livré un combat
sans merci contre la technologie (Carl, l'ordinateur), part à la découverte
de la vérité non pas la sienne mais la vérité universelle. Evoluant dans un
univers à peine imaginable, ses yeux lui décrivent ce qu'aucune parole ne pourrait
expliquer; il fait comme à rebours le voyage inverse vers le centre de la terre.
Dans quel but? Il est l'élu, celui qui a tout sacrifie, qui détient désormais
le pouvoir. Ecrasé par le terrible voyage auquel il est soumis, sa pupille réflectrice
de la vision des hommes se rétracte, enregistre pour la postérité l'invisible
parce que trop grand, la divinité faite homme. Lorsque Bowman touche le fond,
le cartésianisme qui l'illumine n'est autre que l'imaginaire débordé, pris d'assaut
par tant de visions qu'il lui faut une représentation, un point de repère. Sa
vie est terminée avant même qu'il ait commence son voyage. Son inconscient uvre
pour l'inconscient collectif. Il pénètre Dieu comme Dieu a pénétré les hommes;
il enfante un nouveau soi, une nouvelle croyance que les hommes s'efforceront
de déchiffrer. Ils ont le temps, ils sont éternels et, petit à petit, viendront
former cette pensée en fusion, la grossir autant que la raffermir, la juger
autant que l'approcher. 2001: l'odyssée de l'espace est un "trip",
une vision on ne peut plus optimiste de l'humanité, c'est mon film le plus ouvert
et je suis heureux que chacun conforte sa propre version. La terre est un assemblage,
l'univers aussi. Le jour ou la pensée humaine sera conforme, le cinéma n'existera
plus.
POST SCRIPTUM
Il nous a paru intéressant d'ajouter la réponse que Kubrick avait faite à la même question
dans Newsday en Juin 1968, lors de la sortie de 2001.
C'est là où vous pénétrez dans ce qu'on pourrait appeler "la zone fertile de l'ambiguité"; parce qu'il y a une explication très simple et très littérale au niveau le plus élémentaire du scénario. Un objet a été laisse sur Terre par des explorateurs extra-terrestres, il y a cinq millions d'années. Un autre objet a été place sur la Lune afin de pouvoir témoigner du premier pas trébuchant de l'homme dans le cosmos. Un autre a été abandonne sur l'orbite autour de Jupiter pour servir de relais. Lorsqu'il arrive sur Jupiter, l'astronaute Bowman est jeté dans un champ de forces qui l'entraîne dans une dimension spatio-temporelle située dans un autre endroit de la galaxie. Il va être "parqué" dans l'équivalent d'un zoo humain pour y être étudié. Sa vie se passe dans une pièce et cela ne lui semble durer qu'un instant. Il se peut qu'il y passe toute sa vie normale ou bien qu'elle soit télescopée ou encore qu'elle soit réduite à quelques minutes. Il meurt et il renaît sous une forme supérieure. Il revient sur Terre comme ange ou comme surhomme; transfiguré du moins. Au niveau le plus simple du film, c'est ce qui arrive. Mais le fait que l'on n'utilise pas de mots et que l'évènement ait des résonances lointaines est positif. En d'autres termes, le film signifie tout ce que l'on peut ressentir à son sujet. Je ne pense pas devoir m'appesantir au delà de ce niveau. Bien entendu, toute impression que vous pouvez ressentir à l'égard de 2001 est valable si elle ne contient pas de contradictions. S'il a de l'effet sur vos émotions, sur votre subconscient, sur vos aspirations mystiques, alors il a réussi. Une fois que vous êtes parti dans des méditations, une fois que vous avez admis que l'univers est probablement rempli de civilisations évoluées, parce qu'il y a cent milliards de galaxies dans l'univers visible, certains de ces mots doivent se situer à un niveau que l'esprit humain ne peut concevoir. Ces êtres auraient certainement des pouvoirs incompréhensibles. Ils pourraient être en communication télépathique à travers l'univers entier ils pourraient avoir la capacité de façonner les évènements d'une manière divine. Ils pourraient enfin représenter une sorte de conscience collective immortelle qui voyage à travers l'univers. Quand vous commencez à vous intéresser à ce genre de sujet, les implications religieuses sont inévitables parce que tous ces caractères sont ceux que l'on attribue à Dieu. Ainsi voilà donc, si vous le voulez, une définition de Dieu parfaitement scientifique.
L'Entrevue, par Jean-Marc Boineau
Le petit livre de Stanley Kubrick, SpartOrange, 1994
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