
C'est le film d'un bon élève, sans plus. Admirateur a la fois de Max Ophüls, de Aldrich, de John Huston, Stanley Kubrick est loin encore d'être le fort en thème que nous claironne la publicité tapageuse faite autour de ce petit film de gangsters en face du quel même Asphalt Jungle est un chef-d'uvre. A plus forte raison En Quatrième Vitesse. Et je ne citerai pas Ophüls, qui n'a rien à voir dans l'affaire, si Stanley Kubrick ne se réclamait de son influence par des agaçant mouvements d'appareil, tels que les aimait le metteur en scène du Plaisir. Mais ce qui chez Ophüls correspondait à une certaine vision du monde, chez Kubrick n'est qu'esbroufe gratuite.
L'entreprise, pourtant, ne laisse pas d'être sympathique. Production indépendante, The Killing a été tourné vite et avec peu de moyens. Si le scénario n'est pas particulièrement original (l'attaque du pari mutuel de Los Angeles) et l'épisode final guère plus (les billets de banque s'envolent au vent par la suite d'un malheureux hasard bien mal filmé, tout comme dans Le Trésor de la Sierra Madre), il faut en revanche louer l'ingéniosité de l'adaptation qui, adoptant systématiquement la "déchronologie" des actions, sait nous intéresser à une intrigue qui par ailleurs ne sort pas des sentiers battus. Une fois que l'on aura dit du bien de la photographie style "actualité", et de Sterling Hayden, il n'y aura plus qu'à attendre sans trop d'impatience le prochain long-métrage de Stanley Kubrick, Paths of Glory, dont la presse américaine dit le plus grand bien.